Essai Peugeot 208 2019 : Gueule d’enfer

Renouveler un best-seller n’est jamais aisé. Et si certains choisissent de ne pas bousculer leurs clients en faisant preuve d’un certain conservatisme, d’autres comme Peugeot décident de partir d’une feuille blanche. C’est le cas de la petite 208, qui affute ses crocs face à une concurrence de plus en plus rude.

La Peugeot 208, c’est une des voitures les plus vendues en France depuis son lancement en 2012. Elle se bat depuis des décennies avec la Clio, les deux françaises alternant entre première et deuxième place du podium. Mais la 208 ne démérite pas, et elle est la digne héritière de la longue lignée de citadines en 20_. Dans les années 1980, la 205 a sauvé Peugeot comme on l’entend souvent. En 1998, c’est une 206 plus moderne qui est commercialisée, avec des carrosseries déclinées en coupé-cabriolet « CC » et break « SW », véritables succès commerciaux. La remplaçante, la Peugeot 207, connaîtra un succès moins important que sa devancière, ce qui poussera Peugeot à faire des choix pour ce qui deviendra la 208 en 2012. Elle arrive avec de sérieux arguments, dont un tout nouveau i-Cockpit (la première génération à l’époque) et des moteurs essence modernes. Mais elle abandonne la carrosserie CC qui perdurait sur la 207, et transforme sa déclinaison SW en petit SUV avec le 2008 pour s’adapter à la mode.

Modernité ou continuité ?

Cette année, les deux françaises se relancent dans la bataille avec de nouvelles générations : la Clio 5 fait dans le classicisme avec un dessin très proche de la Clio 4, qui ferait presque penser à un restylage, tandis que la nouvelle 208 change radicalement de style. Ainsi, la Lionne se veut plus agressive et assise sur la route : elle est plus basse et râblée, et gagne quelques cm en longueur. Elle dépasse donc à nouveau les 4 mètres en se rapprochant de la Clio, avec 4,05m contre 3,97m pour l’ancienne 208. Le style est aussi plus proche des dernières productions sochaliennes, avec l’intégration de feux de jour dans des crocs à l’avant comme la dernière 508, et un bandeau noir laqué reliant les feux à l’arrière comme les 3008, 5008, et 508, ainsi que le nouveau 2008. L’intégration du bandeau est un peu moins réussie selon nous, avec un côté un peu disproportionné en raison de l’emplacement très bas de la plaque d’immatriculation. Ceci laisse un grand vide sur le hayon, pas forcément des plus heureux. La calandre est aussi plus imposante, avec des petits picots qui sont colorés sur la version électrique. Enfin, le profil peut être agrémenté d’arches de roues noir laqué sur certaines finitions, rappelant les 205 GTI. Le clin d’oeil ne s’arrête pas là, avec un petit renfoncement sur la custode arrière où est inscrit la version. Comme beaucoup de petites citadines, la nouvelle 208 abandonne la variante 3-portes pour une unique carrosserie à cinq portes. Ainsi, la forme du vitrage arrière est moins dynamique, et fait beaucoup penser à sa cousine la Citroën C3.

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A bord, le changement est tout aussi important, voire spectaculaire sur certains aspects. On retrouve ce qui a fait le succès des dernières Peugeot, et qui a été initié par la première 208 : une planche de bord futuriste en plusieurs couches horizontales. Baptisé i-Cockpit, ce dessin de planche de bord plaît par son côté moderne, et a été amélioré depuis la première version en 2012. Ainsi, l’écran tactile est toujours placé en hauteur et disponible en plusieurs tailles (5, 7 ou 10 pouces selon version) mais il est cette fois orienté vers le conducteur. En dessous, on retrouve une zone de ventilation pour la climatisation, qui surmonte les raccourcis « touche piano » qui permettent de naviguer dans les nombreux menus du système infotainment. D’ailleurs, heureusement que ces raccourcis existent car tout ou presque se pilote par l’écran. C’est le cas de la climatisation, même lorsqu’elle est manuelle : aucun bouton physique, ce qui implique de quitter la route des yeux pour changer de température. D’autres part, les boutons raccourcis sont en deux parties : les touches physiques principales en gris façon alu, et d’autres fonctions sur une bande noir laqué mais sans retour haptique. Il arrive donc qu’on se demande si on a bien cliqué sur le bouton, le système étant parfois lent…

Le plus « spectaculaire » dans cet intérieur est assurément le combiné d’instrumentation numérique à effet 3D. Les compteurs 100% numériques sont de plus en plus évolués, et puisque cela ne suffisait pas on y ajoute désormais des effets. Ainsi, les informations sont affichées sur deux plans différents, et l’affichage peut être personnalisé avec la navigation, l’affichage du régulateur actif, etc. S’il peut paraître tout à fait gadget, ce compteur numérique nouvelle génération nous a convaincu par sa lisibilité même en plein soleil, et l’effet 3D totalement maîtrisé. Par contre, certains auront toujours du mal à le voir à cause du petit volant. En effet, un des principaux reproches des Peugeot récentes est qu’en fonction de la position du siège, du petit volant à méplat et de la taille du conducteur, les compteurs de vitesse peuvent être cachés. Depuis la première 208, ce défaut est régulièrement cité, et la nouvelle génération n’y échappe pas. Et à part conduire plus haut ou avec le volant dans les genoux, il n’y a pas d’autres solutions…

Arrêtons nous quelques instants sur le reste de l’habitacle. Celui-ci est plutôt bien présenté et moderne, avec des astuces telles que le couvercle du rangement pour le chargeur à induction qui peut devenir un support pour téléphone. A l’avant, les sièges sont bien dessinés et offrent un maintien appréciable. Les finitions offrent chacune des selleries distinctives, mais toutes sont agréables à l’oeil. L’arrière est quant à lui moins agréable, car même si la 208 a pris quelques cm, cela ne profite ni à l’habitabilité arrière ni au coffre. Ce dernier pointe à 311 litres, contre 391 litres pour sa rivale au Losange qui propose en plus un double plancher pratique.

Thermique ou électrique ?

Côté moteurs, là aussi il y a du changement ! La 208 est proposée en deux versions : une citadine thermique classique, avec trois blocs essences et un diesel allant de 75 à 130 ch, et une version électrique de 100 kW pour la première fois ! Nous avons pu prendre le volant de toutes ces versions lors de notre essai au Portugal, et ils ont chacun leurs arguments.

Les trois moteurs essence sont uniquement des trois-cylindres 1.2 PureTech. La première variante, forte de 75 ch, est surtout utilisée sur les versions entrée de gamme. Elle est équipée d’une boîte manuelle à cinq rapports uniquement mais s’en sort plutôt bien malgré la faible puissance. En ville, ce PureTech 75 se montre assez vif lors des démarrages, et plutôt silencieux si on ne le fait pas grimper trop haut dans les tours. Il sera bien sûr moins adapté pour ceux qui font plus de route, notamment lors des dépassements sur nationale ou des insertions en montée sur l’autoroute…

La déclinaison 130 ch, ici en version GT Line, s’offre une double sortie d’échappement chromée.

Ainsi, le PureTech 100 ch est déjà bien plus polyvalent ! Toujours aussi vif entre 0 et 50 km/h, il est plus adapté au réseau secondaire, et donne le sentiment d’avoir plus de 100 ch grâce aux relances. Il est aussi moins bruyant grâce à une insonorisation travaillée et à sa boite de vitesse manuelle à six rapports. Il peut aussi être équipé d’une boîte automatique à convertisseur EAT8, mais qui risque de trop lisser les performances tout de même modestes… En effet, nous avons pu prendre le volant de la version 130 ch EAT8, qui n’est disponible malheureusement qu’avec cette boîte auto comme la Clio 1.3 Tce 130. Ce qui est fort dommage pour les amateurs de conduite plutôt dynamique, car les sensations sont totalement lissées par cette boîte d’origine Aisin. Malgré la puissance du bloc, on s’amuse moins avec…

Sous la ventilation, des raccourcis qui permettent de piloter le système d’infodivertissement sont intégrés comme sur les derniers modèles Peugeot, façon « touches piano ».

Le seul diesel de la gamme 208 est un petit 1.5 BlueHDI de 100 chevaux seulement, ce qui peut étonner. Il est assez volontaire, malgré une sonorité pas franchement agréable lors des montées en régime. Mais il a le mérite d’exister, quand beaucoup de concurrentes abandonnent totalement cette motorisation. Ainsi, il propose une alternative destinée aux gros rouleurs.

Mais la vraie alternative, c’est la version électrique de la 208 ! Baptisée e-208, elle reprend entièrement le design de la version thermique, et ne s’en distingue que par de très menus détails : logos bleu-vert, calandre à picot de la couleur de la carrosserie, jantes spécifiques… Cela fait plaisir de retrouver un design accrocheur et sportif, qui convient aux deux variantes et sort un peu du schéma de la voiture électrique trop différenciante. Peugeot nous a d’ailleurs expliqué que l’idée était que le client arrive en concession, choisisse d’abord sa couleur, sa finition, ses options, puis seulement après le type de motorisation en fonction de ses besoins.

Nous n’avons fait que quelques kilomètres à bord de cette 208 « branchée », mais elle s’est révélée encore plus agréable à conduire. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce sentiment. D’abord, le centre de gravité plus bas grâce aux batteries de 50 kWH placées sous le plancher. Ainsi, on ne perd pas de place, et le volume de coffre est le même que pour la version thermique. Et malgré le poids supplémentaire, cette 208 électrifiée donne une sensation d’agilité bienvenue, notamment dans les virages. Cette agilité même qu’on ne retrouve pas forcément sur la version thermique, un peu plus aseptisée et typée confort que l’ancienne génération. Ensuite, on évolue dans le silence comme toutes les électriques, et avec de très bonnes performances : le bloc électrique développe 100 kW, soit environ 136 ch. Il offre donc de belles poussées : le 0 à 50 km/h est abattu en seulement 2,8 s, et le 0 à 100 km/h en 8,1 s (contre 8,7 s pour le bloc essence de 130 ch). Par contre, il faudra faire avec une autonomie de 340 km en WLTP. Cette valeur paraît plutôt confortable pour le quotidien, puisque la moyenne française est sous la barre des 50 km effectués par jour. Mais dès que l’on sort de la ville et qu’on prend l’autoroute, l’autonomie fond comme neige au soleil… Les infrastructures étant ce qu’elles sont, certains conducteurs sont encore sceptiques et Peugeot espère réussir à les convaincre. Il proposera par exemple des services d’accompagnement à la carte, allant de l’installation de borne au domicile à la location de véhicule thermique sur un weekend pour faire plus de kilomètres en cas de besoin.

La e-208 se distingue de sa soeur thermiques que par de petits détails, comme les logos bleutés ou la calandre couleur carrosserie… Et c’est tant mieux !

La e-208 est la seule a adopter la finition GT, qui gagne quelques raffinements comme des sièges en alcantara gris. Elle remplace donc l’ancienne 208 GTI thermique, qui n’est pour l’instant pas reconduite. Certaines rumeurs parlent d’une éventuelle version hybride rechargeable plus puissante, à la manière de la Peugeot 508 PSE (pour Peugeot Sport Engineered), que le directeur général de Peugeot Jean-Philippe Imparato a d’ailleurs confirmé cette semaine.

En résumé, la nouvelle 208 fait plus dans le confort que sa devancière, et perd légèrement au change sur la partie dynamisme. Elle est un peu en-dessous sur ce domaine là par rapport aux Peugeot récentes, avec une direction moins franche et des moteurs agréables mais souvent lissés par la boîte automatique EAT8. Finalement, c’est la e-208 qui s’est révélée la plus amusante à conduire, avec son centre de gravité plus bas qui permet des vitesses de passage en courbe plus importantes et donne le sourire avec ses franches accélérations. Mais les tarifs salés de cette nouvelle génération, en thermique comme en électrique, permettront-ils à Peugeot de réitérer le succès des précédentes citadines au Lion ? Rien n’est moins sûr…

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